Magazine N°038 : TOUS AU CHEVET DE LA CAISSE NATIONALE DE SÉCURITÉ SOCIALE !

La Caisse nationale de sécurité sociale (CNSS) a été mise sous administration provisoire par l’exécutif gabonais lors du Conseil des ministres du 7 juin 2022. Une décision diversement accueillie par l’opinion qui attend un changement concret dans le traitement des personnes à la retraite dont les revendications récurrentes ont fini par contraindre le président de la République à prendre une décision forte censée mettre fin à la crise qui prévaut au sein de cette structure depuis plusieurs années. Il faut dire qu’au moment où les autorités ont fait le choix de la dissolution du Conseil d’administration et de la Direction générale de la CNSS, le climat social n’était pas des plus favorables, en sit-in à répétition devant le siège social de la structure à Libreville et manifestations dans certaines rues de la capitale. La mobilisation des retraités visait un objectif : se faire entendre, mais surtout alerter sur la difficulté de la Caisse à remplir ses obligations à leur endroit, notamment dans le respect des échéances de paiement des pensions. Leur mouvement semble avoir été entendu.

De l’avis des experts et des partenaires sociaux, l’organisme de prévoyance sociale devait mobiliser un peu plus de 500 milliards de FCFA pour sortir du gouffre. Déjà, au mois de mai 2022, le président du Syndicat des professionnels de la Caisse nationale de sécurité sociale (SYPROSS), André Richard NDI BEKOUNG, annonçait au cours d’une assemblée générale que « le diagnostic de Finactu indique que la CNSS sera en cessation de paiements d’ici juillet 2022, si rien n’est fait ». Peut-on croire que la décision des autorités visait à anticiper cette échéance ? Rien n’est certain. Cependant, le fait d’avoir privilégié la nomination d’un administrateur provisoire que de faire les réformes envisagées sous l’organigramme initial laisse sous-entendre que le politique savait que la situation était désormais catastrophique.

Préserver l’exécution du service aux assurés et le maintien des activités régaliennes de l’entreprise font l’unanimité aussi bien pour le gouvernement que l’opposition. Les autorités se sont données une année pour trouver la meilleure formule pour sortir la CNSS du gouffre. La réalisation de cette ambition a été confiée à Christophe EYI. Auditeur, passé chez Deloitte, BNP et BICIG, l’unique patron actuel de la CNSS était au moment de sa nomination Directeur général adjoint de la Caisse des dépôts et consignations du Gabon (CDC). Il a douze mois pour repenser le modèle gestion capable de sauver l’un des bras séculier de l’État en matière de prévoyance sociale.

Dans cette affaire, la surprise est venue de l’opposition, notamment de l’Union nationale (UN). Cette formation politique, préoccupée par l’éventualité d’un naufrage de la CNSS, s’est employée à soumettre ses réflexions pour une rapide sortie de crise. Le parti de Paulette MISSAMBO a en effet formulé, le 24 juin 2022, six propositions se déclinant en quatorze actions à mener. Il s’agit de : conformer la gouvernance de la CNSS à la loi ; réaliser le nécessaire état des lieux ; recentrer la CNSS sur sa raison sociale ; traiter les dettes de l’État employeur et le sortir de la CNSS ; traiter les dettes des entreprises et accroître le nombre de cotisants ; optimiser la gestion des ressources humaines.

Il faudra donc réaliser un état des lieux par l’inspection régionale de la prévoyance sociale de la Conférence interafricaine de la prévoyance sociale (Cipres). Celle-ci est attendue sur quatre actions d’audit, à savoir : un audit comptable et financier, un audit des prestations techniques, un audit des fichiers cotisants, du recouvrement et les arriérés de paiement sur les cotisations et un audit de la paie et des ressources humaines. Ces différents audits devront être réalisés par un cabinet spécialisé et indépendant, conformément aux statuts de l’entreprise.

Cette contribution de l’opposition pour sauver la CNSS, mais aussi la CNAMGS, convoque la responsabilité de chaque citoyen à se tenir aux côtés de l’État sur des questions impliquant l’intérêt national. Piliers de la solidarité nationale, une faillite des mécanismes contemporains de prévoyance sociale aura inéluctablement de graves conséquences sur l’ensemble de la société. Gageons qu’à la fin du premier semestre 2023, la CNSS, par l’engagement de toutes les parties prenantes, connaisse un retour à l’équilibre budgétaire et financier. Ce qui lui garantirait la réalisation de ses missions.
 

Séif Mostley, Rédacteur en chef

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