Finances, COUP D’ÉTAT ET INQUIÉTUDES SUR LA SOLVABILITÉ DU GABON.

Suspendu par l’Union africaine, par la CEEAC, la CEMAC, et le Commonwealth, la situation politique au Gabon inquiète. Depuis le coup d’État du 30 août 2023, les partenaires internationaux s’interrogent sur la capacité de solvabilité du pays dont la dette publique était encore jugée viable en 2022. L’arrivée au pouvoir des militaires ne va-t-elle pas mettre à mal la confiance de ces partenaires? Du côté des agences de notation, certains ont d’ores et déjà exprimé leurs doutes quant aux promesses des nouvelles autorités. Ont-elles raison ?

LE CTRI TENTE DE RASSURER

Aussitôt installé, le Comité pour la transition et la restauration des institutions (CTRI) s’est voulu rassurant. Son chef de file, le Général de Brigade Brice Clotaire OLIGUI NGUEMA a tenu à échanger avec les partenaires internationaux du Gabon parmi lesquels les diplomates et les représentants des institutions financières. L’objectif affiché par le président de la Transition était, dans un premier temps de leur expliquer le bien-fondé de ce qu’il a présenté comme « une prise de responsabilité » de la part de l’ensemble des Forces de défense et de sécurité gabonaises, et dans un second temps de recueillir d’eux leur sentiment. Mais par-dessus tout, il a souhaité « rassurer l’opinion nationale et internationale quant au respect de tous les engagements du Gabon, tant sur le plan national qu’international ».

Pour prouver sa bonne volonté sur le plan national, le nouvel homme fort du Gabon a par la suite échangé avec les opérateurs économiques les plus importants du pays réunis au sein de la Fédération des entreprises du Gabon (FEG) dont le président Henri-Claude OYIMA lui a officiellement remis un document contenant une douzaine de propositions censées permettre de faire redécoller l’économie gabonais, tout en garantissant un mieux-vivre aux populations. De ces requêtes, quatre ont été retenues et présentées par le président du CTRI comme étant les priorités les plus pressantes : le règlement de la dette intérieure à travers la mise en place d’un club de Libreville ; la restauration de la journée comptable au Trésor dans le but de rétablir l’équité dans la chaîne de paiement ; la mise en place d’un système de prévoyance sociale (CNSS, CNAMGS) placé entièrement sous la gestion du secteur privé pour garantir les droits des travailleurs et des retraités, et la mise en place d’un système bancaire national pour les projets publics.

Si ces annonces ont favorablement été accueillies aussi bien par les patrons d’entreprises en activité dans le pays que par une majorité des Gabonais, celles-ci ont-elles suffi à rassurer hors des frontières ? Pas sûr !

LES INQUIÉTUDES DE FITCH RATINGS

La première à réagir au coup d’État opéré par les militaires au Gabon a été Fitch Ratings. L’agence de notation basée à Paris (France) et à Londres (Royaume-Uni) peu rassurée par l’engagement pris par le président de la Transition. En raison des incertitudes politiques jugées « élevées » suscitées par le coup de force perpétré six jours plus tôt, le 5 septembre 2023, elle a décidé de placer « sous surveillance négative » les notes de défaut d’émetteur à long terme du Gabon en monnaie étrangère et en monnaie locale, « B- ». Cette décision prise dans le cadre d’une révision non programmée, s’explique, selon elle, par le fait que le pays a été suspendu par les deux communautés sous-régionales auxquelles il était membre, la Communauté économique et monétaire de l’Afrique centrale (CEMAC) et la Communauté économique des États de l’Afrique centrale (CEEAC).

Or, l’arrivée au pouvoir des militaires et le chamboulement de l’ordre constitutionnel sont susceptibles d’avoir affaibli les perspectives financières du Gabon en nuisant à la capacité opérationnelle des institutions responsables de la gestion de la trésorerie et de la dette, et en affectant également l’accès du pays aux marchés régionaux de la dette, craint Fitch Ratings qui écrit dans son communiqué : « Nous pensons que le Gabon dépendra davantage du marché régional pour obtenir des financements à des coûts d’intérêt plus élevés, car le coup d’État accroît la nervosité du marché. »

REVIREMENT ?

Passée la phase des inquiétudes, l’agence de notation londonienne a semblé faire un revirement sept jours plus tard en indiquant qu’en dépit de la mise « sous surveillance négative » de la note « B- » du Gabon, elle « ne s’attend à aucun impact négatif sur les notes des supranationales ». Le12 septembre 2023, en effet, Fitch Ratings, qui évoque la situation politique au Gabon et au Niger (en raison du coup d’État du 26 août 2023), a indiqué dans un communiqué que « le risque politique est déjà pris en compte dans les notations des banques multilatérales de développement (BMD) opérant en Afrique occidentale et centrale, et l’exposition à ces deux pays est limitée ».

L’agence explique que, si le Niger, un des pays les plus pauvres d’Afrique avec un revenu par habitant parmi les plus bas du continent, n’a pas accès aux marchés et ne pouvant donc emprunter qu’aux guichets concessionnels de la Banque mondiale et du Groupe de la Banque africaine de développement, le Gabon quant à lui ne dépend pas beaucoup du financement multilatéral du développement et reçoit une part élevée de financement des marchés de capitaux par rapport à ses pairs régionaux.

« Le coup d’État militaire au Gabon n’a pas conduit à des sanctions financières et Fitch s’attend à ce que le souverain continue à assurer le service de sa dette envers les BMD aussi longtemps que cela reste le cas. Le Gabon fait partie de la Communauté économique et monétaire de l’Afrique centrale et de la Communauté économique des États de l’Afrique centrale, qui n’ont jamais récemment imposé de sanctions susceptibles d’affecter le paiement de la dette. La Banque africaine de développement (AAA/Stable) est la plus exposée au souverain gabonais (2,1% de ses prêts) », conclut le communiqué.

MOODY’S DÉGRADE ET PRÉVIENT

Contrairement à Fitch Ratings, Moody’s n’a pas souhaité modifier son jugement à l’égard du Gabon. Bien au contraire. Dans la nuit du 12 au 13 septembre 2023, l’agence de notation américaine a modifié sa perception de la situation de la dette de « stable » à « négative », tout en évoquant les « risques substantiels» suscités par le maintien de la note «Caa1 », une des plus mauvaises pouvant être accordées à une obligation ou à un débiteur. « La perspective négative suggère qu’une amélioration de la note est peu probable à court terme. Cependant, si la situation politique se stabilise et que la transition se déroule de manière ordonnée, la perspective pourrait redevenir stable. À l’inverse, une détérioration durable de la situation politique ou l’imposition de sanctions financières pourrait entraîner une dégradation de la note », explique Moody’s dans son communiqué.

UN AUDIT DE LA DETTE POUR RASSURER

Pour rassurer davantage les partenaires du Gabon, le président de la Transition a annoncé, le 13 septembre 2023, au lendemain du communiqué de Moody’s, la réactivation de la task-force dédiée au contrôle de la dette intérieure et extérieure. « Cette mesure est indispensable et nécessite une évaluation minutieuse et rigoureuse des marchés publics afin de détecter toute irrégularité ou fraude potentielle », a justifié le Général Brice Clotaire OLIGUI NGUEMA sur X (ex-Twitter). À sa suite, dans un communiqué, le CTRI a précisé que cette structure éphémère placée sous la supervision directe du président de la Transition et qui « reprendra tous les actes laissés en suspens par la précédente sans raison évidente », s’attèlera à « vérifier la conformité de l’ensemble des marchés publics ».

En réalité, il s’agit pour les nouvelles autorités de Libreville de montrer qu’il y a une continuité, en dépit du changement de régime politique. Au gouvernement, on reste d’ailleurs convaincu que l’État gabonais « honorera sans aucun doute les obligations liées à sa dette ». C’est, en tout cas, ce qu’a déclaré à Bloomberg le Premier ministre, Raymond NDONG SIMA.

Griffin ONDO

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