ZONE AGRICOLE À FORTE PRODUCTIVITÉ D’ANDEM, Des investisseurs britanniques, indiens et tunisiens marquent leur intérêt

La lutte contre l’insécurité alimentaire est devenue une priorité du gouvernement gabonais qui a décidé de se doter de nouveaux moyens pour développer son agriculture et faire du Gabon un véritable producteur agricole, avec en ligne de mire l’atteinte de l’autosuffisant alimentaire. Aussi, le pays a-t-il décidé, en 2020, de la mise en place des zones dites « spéciales » afin d’accroître son potentiel agricole. Des espaces baptisés « Zone agricole à forte productivité (ZAP) » qui intéressent déjà nombre d’investisseurs internationaux, à l’instar de l’attrait observé sur la ZAP d’Andem, dans la province de l’Estuaire.

Un risque d’insécurité alimentaire aggravé par la crise internationale

Les pays africains à l’instar du Gabon font face à de graves risques d’insécurité alimentaire. Déjà fortement dépendant des importations de denrées alimentaires et agricoles avant le déclenchement de la crise en Ukraine, le 24 février 2022, ce conflit a fortement aggravé cette situation. Les risques d’incertitudes liées à cette guerre qui oppose ces deux acteurs mondiaux de production céréalière ont fait grimper de manière vertigineuse le prix de celles-ci, impactant ainsi gravement les budgets des pays africains fortement appauvris après 2 années de pandémie du Covid19. Face à ce constat, les pays africains n’ont d’autres issues que de favoriser le développement de leur agriculture afin d’accroître la production locale et de limiter les importations des denrées agricoles et alimentaires. Pour le Gabon, sortir de ce cycle pernicieux est vital, car ces importations captent une grande partie des devises obtenues par le biais des exportations des matières premières pétrolières et minières. Le Gabon importe chaque année entre 450 et 500 milliards de francs CFA de produits agricoles selon les autorités. C’est donc la solution choisie par Gabon pour développer son agriculture avec la mise en place des Zones agricoles à forte productivité (ZAP) en 2020.

Des zones spécialisées dédiées à l’investissement agricole

Le gouvernement gabonais a décidé de la mise en place des ZAP afin de parvenir à l’autosuffisance alimentaire. Grâce à un schéma identique à celui déjà mis en œuvre dans le cadre des Zones économiques spéciales (ZES) où un partenariat public-privé a permis la création d’entreprises qui transforment localement les ressources naturelles qu’elles exploitent, les ZAP ont pour but d’attirer des investisseurs dans les domaines de l’agriculture et de l’élevage à travers l’octroi d’avantages fiscaux et une facilitation dans l’accès à la propriété foncière. D’une superficie globale de 75 000 hectares répartis sur 3 provinces, les ZAP d’Andem et de Kango dans la province de l’Estuaire, Idema et Mboukou dans la Ngounié et Bifoun-Abanga dans la Moyen-Ogooué sont les zones désignées par le gouvernement pour la concrétisation de ce projet. Ce dernier a immédiatement suscité l’intérêt d’opérateurs économiques qui y voient ainsi de formidables opportunités.

En effet, le Gabon dispose de plus de 3,3 millions d’hectares de terres arables, ce qui représente un atout considérable pour son développement agricole. C’est la raison pour laquelle des géants des filières agricoles ont déjà noué des contacts avancés avec le gouvernement gabonais dans ce sens.

Des géants du secteur déjà en lice

C’est ainsi que le géant indien AOM a signé le 1er février 2023 un accord de partenariat avec le gouvernement gabonais pour investir dans la ZAP d’Andem. En effet, la société indienne s’est engagée à investir plus de 30 milliards de francs CFA pour la construction d’infrastructures et l’aménagement du site. Selon le ministère en charge de la promotion des investissements, la phase initiale est destinée à la construction du site administratif, d’un centre de formation, de zones de stockage et de commercialisation, de logements sociaux ainsi que l’aménagement du site d’une superficie de 1 000 hectares et le planting. Ce projet devrait permettre à terme la création d’un millier d’emplois pour la construction et 2500 emplois lors de la phase de la phase de développement agricole selon les responsables du groupe indien. D’autres entreprises sont également intéressées par cette initiative.

C’est le cas notamment pour le Centre international d’innovation et de transfert de technologies agricoles, d’élevage et environnementales (CIITTA) a également fait part de sa volonté d’investir dans la ZAP d’Andem. Cette entreprise britannique souhaite être la première à y investir dans le domaine avicole et particulier dans la production de poulet de chair. Par cet investissement dans l’agro-industrie, l’entreprise britannique souhaite également favoriser les échanges techniques afin d’accroître la productivité des producteurs locaux par une formation professionnelle inclusive et favoriser l’accès à des technologies respectueuses de l’environnement. Un mémorandum a été signé, le 3 février 2023, en présence des autorités gabonaises, dont le ministre en charge de la Promotion des investissements, du Partenariat public-privé, chargé de l’Amélioration de l’environnement des affaires, Hugues MBADINGA MADIYA. Des opérateurs économiques africains sont également intéressés par cet ambitieux projet. En effet, le leader dans la production de poulet de chair en Tunisie, la Société moderne d’élevage (SME), a effectué une visite d’inspection auprès des autorités administratives gabonaises. Pour le premier producteur avicole tunisien avec plus de 50 000 unités produites chaque mois, il s’est agi de s’enquérir des facilités d’investissement en vue de leur installation au Gabon. Il faut rappeler que le Gabon est un gros importateur de poulet de chair soit plus de la moitié des importations avicoles qui représentent plus de 200 milliards de francs CFA chaque année. L’objectif pour le gouvernement gabonais avec ces investissements serait donc de relancer la production nationale après l’échec de la société SIAB qui produisait du poulet de chair dans les années 80 et 90 à Boumango dans le Haut-Ogooué. Cette entreprise avait malheureusement fait faillite en 2000 avant d’être liquidée en 2001.

Des investissements prometteurs à terme

Au regard de l’engouement suscité auprès des investisseurs par les ZAP, les espoirs de voir se développer une véritable industrie agricole au Gabon sont bien réels. Pour cela, des efforts gouvernementaux doivent être accomplis en matière d’amélioration du climat des affaires, de protection des investissements étrangers pour les entreprises étrangères qui souhaitent investir au Gabon ainsi que la promotion de partenariats qui permettent aux agriculteurs nationaux de bénéficier de technologies qui accroissent leur productivité et leur rendement agricoles. C’est par ce type de mécanisme que le pilier vert du Plan d’accélération de transformation (PAT) permettra de faire du Gabon un pays autosuffisant alimentaire.

Jean Paul Augé OLLOMO

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